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Incontinence urinaire d’effort


Le 21 octobre 2021

Par le  Dr Sophie Duméry

 

 

 

Le périnée féminin est constitutionnellement faible, ça ne fait pas l’affaire des sportives. Mais il ne faut surtout pas abandonner l’activité physique, plutôt consulter avant que les fuites virent au cauchemar quotidien.

 

Lorsqu’on évoque les fuites urinaires, on fait référence à deux maux différents explique l’Association française d’Urologie (AFU).1 L’incontinence d’effort, très fréquente chez les femmes, se caractérise par une fuite de petite quantité provoquée par une surpression intra-abdominale soudaine : toux, éternuement, éclat de rire. Ce peut être le port d’une charge lourde (déménagement, manipulation de malades), un effort de poussée sur une porte qui résiste, etc. La caractéristique de cette incontinence est de ne pas prévenir, la vessie n’étant pas assez pleine pour envoyer un message de vidange nécessaire. Cela la distingue de l’urgenturie des vessies hyperactives avec envie impérieuse et brusque d’uriner, mal contrôlable, aboutissant le plus souvent à une perte d’urine, sauf WC à proximité. Les femmes qui cumulent les deux situations souffrent d’incontinence mixte, dont les mécanismes diffèrent. Seul l’incontinence d’effort est abordée ici.

 

Anatomie incontournable

L’espèce humaine a évolué du quadrupède au bipède en se redressant. En conséquence ce n’est plus la paroi abdominale, bien musclée, qui retient ses viscères et les grossesses, mais le périnée, c’est-à-dire le plancher du petit bassin (bas-ventre) qui n’est pas aussi dense sur le plan musculaire. Ce plancher périnéal est percé d’orifices naturels qui l’affaiblissent. Il y en a trois chez la femme, d’avant en arrière : la sortie de l’urètre (urines), le vagin antichambre de l’utérus (gestation), l’anus évacuant les féces. L’homme n’en a qu’un, l’anus. La solidité en est sensiblement modifiée !

La hernie des viscères à ces orifices est plus ou moins précoce chez une femme, selon l’hérédité et le mode de vie. Ces prolapsus qu’on appelle vulgairement « descente d’organes » (urètre, vessie, vagin, utérus, rectum) sont en partie limitables par une hygiène adaptée.

 

Constipation et obésité

Le Dr Adrien Vidart (chirurgien urologue, hôpital Foch, Suresnes) inventorie les grands facteurs de risque qui affaiblissement les tissus du périnée : prise de poids, sédentarité prolongée, maladies pulmonaires qui font tousser (BPCO, tabagisme), ainsi que la constipation chronique et ses efforts répétés de poussée pour déféquer (forte hyperpression abdominale). La constipation concerne 70% des femmes à la quarantaine. À quoi s’ajoutent les grossesses et les accouchements. Et les enfants portés 9 mois, dedans, sont ensuite portés dans les bras, dehors. Si l’on ajoute un surpoids ou une obésité, la situation devient critique.

Les femmes obèses souffrent plus souvent d’incontinence urinaire mais aussi anale, avec troubles sexuels, met en garde l’AFU.1 L’incontinence anale peut être multipliée par 3. En obésité majeure (Indice de Masse Corporelle - IMC- supérieur à 40) le risque d’incontinence urinaire est supérieur à 5 par rapport à un poids normal, par l’augmentation de la pression intra-abdominale dans le petit bassin. Les médecins y mesurent une hyperpression vésicale et une plus grande sollicitation des sphincters (anal et urinaire). L’’étirement des tissus crée une irritation locale, source d’urgences et de fuites urinaires. Il suffit d’une perte de poids de 10% pour réduire de 50% la fréquence des fuites chez une obèse…

Notez que le diabète mal traité entraîne à terme des troubles la commande vésicale par atteintes des nerfs locaux. Comme surpoids et diabète se marient souvent, il faut s’en méfier et surveiller la glycémie.

 

Aïe le sport !

Beaucoup promu pour lutter contre les maux de la vie moderne, le sport a ses inconvénients. Les sportives assidues fuitent souvent (une sur deux) mais la perte d’urine est généralement modeste. Dans une étude chez des marathoniennes, 30,7% ont déjà une incontinence urinaire au départ. Et plus de la moitié de celles-là a fuité pendant la course (52,9%). Dans la moitié des cas, les fuites survenaient en fin d’épreuve.2 Certes la moyenne d’âge était de 41 ans, mais 34% n’avaient jamais eu de grossesse et leur IMC était en moyenne de 20,7, donc vraiment mince ! Cependant la gêne exprimée était très faible (1,6 sur 10).

Explication : L’effort de course secoue l’urètre (conduit de sortie de l’urine) qui est d’autant plus mobile que les tissus du bas-ventre sont distendus, par hérédité et/ou par hyper-sollicitation permanente (constipation), et/ou par rupture ou élongation traumatique des ligaments (accouchement). On parle d’hypermobilité urétrale. Le sphincter vésical (qui ferme la vessie) faiblit après une durée d’effort variable, surtout parce que la vessie se remplit du fait de l’hydratation régulière recommandée. Mais gare ! Il ne faut pas réduire la boisson pour éviter de remplir sa vessie, surtout à l’effort : on risque au pire l’accident cardiovasculaire par déshydratation, au moins de sévères courbatures et une baisse de puissance musculaire.

 

Consulter avant le handicap

Les femmes ne consultent quand leurs fuites les gênent, ce qui est très subjectif (voir plus haut les marathoniennes). Le Pr Michel Cosson (gynéco-obstétrique, CHRU de Lille) voit des femmes ne faisant plus rien de peur des fuites. Un critère précis est de s’interdire le trampoline de jardin, jeu très répandu. En effet, à chaque réception de saut, les viscères martèlent le périnée ; de sorte que la plus minime défaillance du sphincter vésical entraîne une fuite. Le trampoline est de fait le sport où les pratiquantes régulières sont quasi toutes incontinentes, peu ou prou.

La solution est de consulter un spécialiste sans attendre le handicap et les troubles sévères. « Un gynécologue ou un urologue n’imposent pas une chirurgie de l’incontinence, affirme Michel Cosson. Celui qui programme une intervention dans les 10 jours n’est pas le bon interlocuteur ! C’est une solution ultime, quand on a tout essayé sans améliorer la vie de la patiente ». Si votre interlocuteur est un excité du bistouri, le Pr Cosson recommande un autre avis, voire deux ; la femme doit choisir sa prise en charge, quel que soit son degré d’incontinence.

Au début de ce siècle, les complications fréquentes des bandelettes de soutien vésical ont fait scandale en chirurgie. Elles relèvent de l’affairisme professionnel et du marketing des fabricants. La réglementation, désormais plus stricte, devrait encore se durcir. Environ 100.000 femmes incontinentes sont opérées annuellement. Il n’y a pas d’âge pour la chirurgie quand elle est nécessaire, en sachant que les résultats se dégradent quand le périnée vieillit.

 

 

 

Pas de couches !
Les protège-slips et autres protections sont un marché florissant, mais les spécialistes y sont hostiles parce qu’elles reculent la prise en charge efficace. La consultation s’impose quand leur port est quotidien, au risque de macération, d’infections urinaires, cutanées…

 

Test & anti-fuite

Voici un test facile et fiable : le tampon périodique. Posé avant le sport ou l’effort physique, s’il suffit à interrompre les fuites c’est une incontinence par instabilité urétrale à l’effort. Beaucoup de sportives y recourent lors des compétitions ou à l’entraînement. La coupe menstruelle aurait le même effet.

 



références

1- Sport et incontinence. Mesdames faites les bons choix. Association Française d’Urologie.

https://www.urologie-sante.fr/base-bibliographique/sport-et-incontinence-mesdames-faites-les-bons-choix

2- Incontinence urinaire chez des coureuses de loisir de marathon. Urinary incontinence in non-professional female marathon runners. Y.Abitteboul, F.Leonard et coll. Progrès en Urologie 2014 ; 25 : 636