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En théorie, tous les médicaments (et spécialement les nouveaux) sont contre-indiqués pendant la grossesse. Cette précaution tient surtout dans l'impossibilité éthique de faire des études cliniques de tolérance chez la femme enceinte. Mais attention, pas de panique, on dispose d'un recul suffisant aujourd'hui avec beaucoup de médicaments courants. C'est le cas de médicaments utilisés depuis longtemps ou de ceux qui ont pu être pris par inadvertance ou ignorance par des femmes enceintes sans conséquences néfastes.
Il faut savoir que pour tout médicament qui obtient son autorisation de mise sur le marché (AMM), une évaluation spécifique du risque au cours de la grossesse est conduite par les experts qui délivrent cette AMM. Leurs conclusions sont synthétisées dans la rubrique 6 (fertilité, grossesse et allaitement) du Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP). Ce texte est repris dans la notice incluse dans chaque boite de médicament et disponible sur Internet (www.base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr).
Bien évidemment, ces données vont évoluées avec le temps et l'expérience acquise pour chaque médicament. Il existe au sein de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) une commission spécialisée pour suivre les effets indésirables, particulièrement ceux survenant durant la grossesse.
Quels sont les médicaments à risque ?
Il est impossible de dresser la liste exhaustive des médicaments à risque pendant la grossesse. D'une part certains médicaments seront néfastes à un moment donné mais pas à un autre, d'autre part il existe une variabilité individuelle difficile à estimer concernant la survenue d'effets néfastes pour le bébé.
Toutes les classes de médicaments sont concernées. Mais heureusement, il existe dans chaque classe généralement un médicament que l'on peut prescrire durant la grossesse (voir encadré).
De nombreuses patientes atteintes d'une maladie chronique souhaitent devenir mères. Comme bien souvent, il n'est pas possible d'envisager une interruption de traitement, cela peut poser problème. Seule une prise en charge attentive par le médecin traitant, par le spécialiste et le gynéco accoucheur, permettra d'indiquer la conduite à tenir. Mais il faut savoir que certains traitements sont formellement contre-indiqués durant la grossesse et imposent la prise d'une contraception.
La grossesse induit de profondes modifications dans l'anatomie et la physiologie de la femme. L'organisme réagit parfois en provoquant des troubles qui, dans l'immense majorité des cas, peuvent être traités par des médicaments connus comme bien tolérés et sans contre-indication. Les nausées, les vomissements peuvent être soulagés avec des antiémétiques, les infections par la plupart des antibiotiques de première intention, les douleurs par le paracétamol, etc.
L'impact que peut avoir un médicament sur la grossesse est fonction du déroulé de cette grossesse.
Au moment de l'implantation de l'ovule fécondé dans la muqueuse de l'utérus, les médicaments n'auront généralement pas d'incidence ou au contraire, ils peuvent entraîner la mort f'œtale. Cette deuxième éventualité passera généralement inaperçue.
Jusqu'à la fin du troisième mois environ, c'est la période (embryonnaire) de formation des organes. Le risque majeur de malformations de l'embryon se situe entre le treizième et le cinquante-sixième jour. La dangerosité des médicaments va être fonction de la toxicité de ces médicaments sur tel ou tel organe, et fonction de la période de formation de ces organes.
Après le troisième mois, les risques sont moins importants mais ils existent néanmoins. En effet, les médicaments peuvent éventuellement entraîner un dérèglement métabolique, tant chez le f'œtus que chez la maman.
Les effets tératogènes ou malformatifs. Les anomalies de développement de l'embryon entraînant une malformation sont liées à une prise médicamenteuse contre-indiquée, en début de grossesse (les trois premiers mois).
Les effets foetotoxiques se traduisent par un ralentissement de la croissance f'œtale ou des retards de maturation des tissus. Ce risque est maximal au deuxième trimestre.
Les effets néonataux sont consécutifs aux prises médicamenteuses de fin de grossesse ou pendant l'accouchement.
Il existe également des effets à distance de la naissance. Par exemple des troubles cognitifs ou du comportement peuvent survenir à distance, de la naissance voire à la seconde génération.
D'une façon générale, ne rien prendre sans l'avis du médecin ou du pharmacien
Seul le paracétamol peut éventuellement être utilisé durant la grossesse, mais à la dose efficace la plus faible, pendant la durée la plus courte et le moins fréquemment possible. L'aspirine est déconseillée. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens, lesquels peuvent entraîner des malformations en cas d'usage prolongé, sont contre-indiqués à partir du début du sixième mois.
Paradoxalement, une supplémentation en vitamine peut être dangereuse pendant la grossesse. Par exemple, la vitamine A est tératogène à forte dose, les vitamines C et D sont susceptibles d'entraîner chez le f'œtus des troubles de l'absorption du calcium et des malformations du visage, ainsi que des troubles du c'œur, des vaisseaux et du système nerveux central. Faisons plutôt confiance aux apports en vitamine d'une alimentation équilibrée.
De nombreux médicaments contre la toux sont dangereux pendant la grossesse. Un avis médical est obligatoire si un antitussif est nécessaire.
Les sels d'aluminium ne doivent pas être employés durant le premier trimestre de la grossesse. Pour combattre la constipation, symptôme courant de la femme enceinte, il faut se méfier des extraits d'aloès. Pour les nausées, il est nécessaire de faire appel au médecin qui prescrira un médicament inoffensif pour la mère et l'enfant.
Depuis, quelques semaines, des pictogrammes d'avertissement sont apposés sur les boîtes de médicaments dont la prise comporte des risques pendant la grossesse.
Deux modèles de pictogrammes sont prévus. Un pictogramme « danger » (silhouette de femme enceinte dans un triangle rouge) qui signale que le médicament doit être utilisé uniquement s'il n'y a pas d'autre médicament disponible.
Un pictogramme « interdit » (silhouette de femme enceinte dans un rond rouge barré) qui signale aux patientes que le médicament ne doit pas être utilisé.
Photo Phovoir/Atelier Frantz Lecarpentier
http://ansm.sante.fr/Dossiers/Medicaments-et-grossesse/Evaluation/(offset)/1